PAR LE BAS LA SORTIE (DE CRISE) !

Lecteur, quelles conclusions tires-tu des trois observations suivantes ?:

  1. En France 35 millions de montres neuves sont distribuées chaque année ;
  2. La production d’une tonne de nourritures terrestres implique la perte de quatre fois plus de terre ;
  3. il faudrait 500 ans, au rythme de production actuel, pour couvrir nos besoins d’électricité mondiaux à l’aide de panneaux solaires, en renouvelant le parc chaque ½ siècle.

age_low_tech_Philippe_BIHOUIX

L’auteur en retient qu’il est l’heure de garder les pieds sur terre pour y voir clair : on le sait désormais,  nous consommons trop et surexploitons nos ressources finies. Ce que nous admettons moins fait le sel (régénérant) de cet ouvrage : les nouvelles technologies ne sauveront pas la croissance. La course à une énième révolution industrielle ne devrait pas nous faire renoncer à une double (intime et collective) révolution mentale. Et pourquoi le progrès serait-il forcément technique ?  Ingénieur éprouvé aux Hautes études, spécialiste des métaux, voilà pour la page du CV  de Philippe BIHOUIX. Il écrit ce livre à partir de sa marge et nous enjoint au renoncement joyeux* : rousseauiste du XXIè siècle, il suggère un contrat social bâti sur une radicale sobriété et des éducations manuelle et intellectuelle élevées au même rang. N’eut été la Fondation de l’écologie politique** dont l’auteur a reçu le premier prix du livre francophone l’automne dernier, cette lecture de première nécessité serait restée sous les radars.

*quoique teinté de malthusianisme.

**think tank dirigé par la philosophe Catherine Larrère.

DES CHIFFRES ET DES ETRES

mac_candless_datavizSi je suis informé(e), je suis investi(e)…d’un pouvoir ou d’un devoir d’agir. Les données « donnent ». A comprendre, à réfléchir, elles donnent aussi lieu à monétisation (big data) et de plus en plus, se donnent… à voir ! Antidote à l’infobésité ambiante, les statistiques savent se faire belles, profondes, intelligibles.  Le poids des mots, le choc des photos cèdent le pas à la beauté de l’info. Ses stylistes ? Des « data designers ». David McCandless, le plus contemporain et célèbre d’entre eux se définit à la fois comme journaliste et graphiste. Auteur du bien titré « information is beautiful » en 2009(1), il creuse cette ambition de nous rendre intelligents par la vue en publiant « knowledge is beautiful »(2). La production exponentielle de données et la démocratisation de la culture graphique confèrent une nécessité historique à cette discipline hybride, enfantée par Excel et In Design ! Science salutaire. Nouveau continent qui nous recueillera tous autant que nous sommes, naufragés de l’océan informationnel. Continent politique puisque partie émergée d’une pensée visible et plateforme donnant potentiellement à agir : allez voir (par exemple) « le pariteur » pour vous en convaincre(3). Dans un tout autre registre et en 4D, cent parisiens(4) se sont prêtés sur scène à un exercice de « dataviz » l’an dernier grâce au talent du collectif Rimini Protokoll : on savait faire parler les chiffres, on sait désormais les incarner ! Le spectacle est en ce moment à Amsterdam mais s’il vient dans votre ville soyez présent, à 100%.

 

(1) DATAVISION chez Robert Laffont (en français)

(2) paru en novembre 2014 en anglais seulement pour l’instant.

(3) http://appli-parite.nouvelles-ecritures.francetv.fr/

(4) parmi lesquels quelques JD ! Spectacle intitulé « 100% Paris ».

INCUBER OU COMMENT POUSSER LES JEUNES POUSSES

STARTUPS 2_NEF CENTRALE Wilmotte et Associes ArchitectesDe nouveaux acteurs économiques autoproclamés « accélérateurs » n’ont pas attendu le rapport remis cet été par Jean Pisani-Ferry à François Hollande : « Quelle France dans 10 ans ? » : selon l’auteur, trois lignes de force dessinent l’entreprise du XXIè siècle : la formation par-delà le diplôme, l’essor des technologies notamment numériques, l’aspiration sociétale des nouvelles générations vers plus d’autonomie et d’épanouissement dans le travail.

Le plus grand incubateur du monde

Trois longues nefs, de grandes verrières, des voûtes de voile mince en béton armé, des auvents extérieurs qui courent le long des façades sur plus de 300 mètres de long, 70 mètres de large et 16 mètres de haut : bienvenue à la Halle Freyssinet dans le 13e arrondissement de Paris.

Conçue en 1927 par Eugène Freyssinet, la Halle éponyme accueillait alors le centre d’expérimentation de ses deux inventions, le compactage du béton par vibration et le béton précontraint. L’ingénieur des Ponts et Chaussées pouvait-il imaginer que son immense ouvrage, quoique marqué du sceau de l’innovation, allait accueillir le plus grand incubateur du monde?

Vous avez bien lu : la Halle Freyssinet accueillera, dès 2016, près de 1000 startups sur plus de 30.000 m2. Une première mondiale. Cette future locomotive de l’entrepreneuriat verra le jour grâce au partenariat entre la Ville de Paris, la Caisse des Dépôts et Consignations et Xavier Niel, co-financeurs.

Ces startups bénéficieront d’un espace de travail unique pour émerger et transformer leurs projets en véritables entreprises de rang mondial. La Halle Freyssinet offrira des espaces de coworking, un Fab Lab (imprimantes 3D en accès libre), un grand auditorium, des salles de réunions, de larges espaces de travail, un immense bar-restaurant  ouvert 24h/24, autant de lieux de rencontres, d’échanges et de liberté. Unique par sa taille et sa modularité, ce lieu participera à faire de Paris, ville numérique, la capitale la plus innovante d’Europe!

38,2 °C le matin.

Un phénomène aura préfiguré la sortie de terre de la Halle Freyssinet : une douce fièvre saisit en effet l’entreprenariat depuis presque 10 ans en France. La poussée est parisienne mais pas seulement…

En 2005, à Mountain View, Paul Graham initie une deuxième génération d’accélérateurs privés (après celle de la nouvelle économie). L’idée principale consiste à fertiliser le projet de l’entrepreneur en laissant les coudées franches à ce dernier. Et ce, sur une période circonscrite à 3 mois promis à une folle densité.  Le Y Combinator est né et fait école : la même année à Paris, Advancia crée un « générateur d’entreprises » deux ans avant le Seedcamp Outre Manche lequel essaime depuis partout en Europe. Toujours sur ce modèle d’échanges fiévreux, en 2011, L’association Silicon Sentier invente le Camping : chaque semestre, 12 startups bénéficient de conseils de 60 mentors et d’événements comme l’Investor Day, où les projets sont pitchés devant 100 investisseurs européens. Google est partenaire du Camping et offre 4 500 euros à chaque projet débutant. Marie-Vorgan Le Barzic, secrétaire générale de l’association, désormais baptisée NUMA, complète : « on nous compare à une salle de sports. Nous y accueillons des athlètes. Avec notre concours, ils franchissent des paliers et peuvent atteindre un très haut niveau. » A chacun des trois premiers étages de ce building entrepreneurial, sis rue du Caire à Paris,  des tablées câblées couvent ou peaufinent de potentielles pépites. Frédéric Mazzella, le fondateur de Blablacar s’est adossé à NUMA pour y conduire ses états d’usage à l’heure de basculer en modèle payant.  TWITTER a récemment fait l’acquisition de MESAGRAPH, startup qui aura campé ici.  Vous voulez rêver le futur ? Un seul exemple, allez voir DREEM(1) où comment notre sommeil peut améliorer nos performances quotidiennes.

Performer, nous y voilà. L’accélération charrie son lot de turbulences. Parce que les accélérateurs s’investissent désormais plus qu’ils n’investissent, ils réfléchissent, infléchissent voire triturent le projet initial ! Adrien Mirguet, cofondateur de VINOTRIP en témoigne…et en redemande :

« Une réunion « électro-choc » nous a d’autant plus secoués que nous partagions la plupart des constats de nos mentors. Si nous restons convaincus que l’oenotourisme est une lame de fond, cette remise en cause complète de notre modèle est très exactement ce que nous sommes venus chercher à L’Accélérateur car, seuls, la tentation est forte de raisonner en déformation d’un historique, jamais en rupture… »

La posture mentale la plus à rebrousse poils du (petit) monde des accélérateurs se cristallise dans les initiatives tranchantes du groupuscule « the family ». Pourfendeurs du « business as usual » et sectateurs du « growth hacking », ou comment acquérir des clients sans payer, le disruptif trinôme fondateur de cette famille(2) qui a déjà fait éclore 160 startups depuis sa création en février 2013, postule que « tout le monde peut entreprendre. « En 1995, il fallait 1 million d’euros pour lancer une entreprise numérique. Il en faut 15 000 aujourd’hui». Erika Batista, membre de ladite famille, poursuit : « The family prend 3% du capital des startups qu’elle élève. Nous faisons tout pour que la jeune entreprise atteigne le point mort dés la première année. » A la question des profils recherchés, Erika répond : « Nous misons avant tout sur des esprits « naughty ». Traduisez irrévérencieux.

Ce même désir de faire émerger et grandir l’excellence doublé d’un défi à l’endroit des institutions et du système éducatif habite Antoine Amiel, fondateur à 23 ans de Learnassembly.com. « je veux une université libre et participative pour entrepreneurs » déclare t-il. Ambition établie sur le trépied suivant : primo, démocratiser les compétences (pour 49 euros, on peut passer 2h30 au contact d’un expert en community management). Secundo, le fond et le format doivent s’adapter au public. Tertio, chacun de nous est condamné à l’apprentissage perpétuel !

Quoique surtout parisiennes, ces structures « pousse-jeunes », outre l’accessibilité universelle de certains de leurs contenus grâce au web, s’installent en région. Ainsi le réseau de « Cantines », sur le modèle initié en 2008 par l’association Silicon Sentier distille la fièvre entrepreneuriale à Rennes, Toulouse, Nantes plus une dizaine d’autres lieux associés.

Sous l’aile de grands groupes

Le député-maire de Neuilly-Sur-Seine, Jean-Christophe Fromantin, a innové en 2013 avec une initiative unique en France. Il a créé une pépinière d’entreprises dont les jeunes pousses ne sont pas incubées sous un même toit, mais hébergées au sein de 20 grandes sociétés implantées à Neuilly. Parmi elles, Altran, Chanel, GDF Suez, JCDecaux, M6, UGC ou Warner Bros. Chacune de ces entreprises membre s’engage à offrir à une startup pendant 23 mois, tout le confort physique et l’assistance nécessaire sur le plan technique, les questions juridiques et les ressources humaines, pour qu’elle se concentre sur son développement commercial.

Selon Jean-Gabriel Bliek, le directeur du développement économique de la ville de Neuilly, le programme « Neuilly Nouveaux Médias », compte actuellement 10 startups incubées. En phase d’amorçage, elles ont toutes moins de 3 ans et ont élaboré un service ou un produit innovant. Chaque semestre, 2 à 3 startups sont sélectionnées pour rejoindre l’un des grands groupes Neuilléens. Incubation de luxe, certes mais sélectivité rime avec efficacité: début 2014, hébergée depuis moins d’un an chez Deloitte, Shopmium, une application mobile de couponing, a levé 5 Millions d’euros et a réussi à s’implanter aux Etats Unis.

Incuber, pourquoi pas chez vous?

Environ une entreprise sur deux meurt dans les cinq ans en France. Gageons que chacune des formules évoquées ci-dessus ouvre la voie à une meilleure « vitalité infantile » de nos entreprises. En réduisant « forces de frottement » et en rompant l’isolement de l’entrepreneur, elles favorisent la créativité et libèrent les énergies!

Si l’accueil de jeunes pousses dans une entreprise dessine des opportunités et stimule l’innovation des deux côtés, pourquoi ne pas mettre à disposition un bureau, partager une salle de réunion avec de jeunes entreprises? A l’ère du partage de voitures entre particuliers, pourquoi ne pas imaginer partager et monnayer infrastructures et bon procédés ? C’est peut être l’un des leviers pour développer de nouveaux projets, trouver de nouvelles opportunités pour votre business, et qui sait, participer à l’un des succès entrepreneuriaux de demain?

Thefamily.co

LA FRANCHISE, PHENOMENE FRANÇAIS

Passé de 34 magasins franchisés en 1971, à 1719 en 2013, l’hexagone s’affirme comme leader européen. De nombreux indicateurs soulignent l’excellence française pour la distribution, pas seulement la grande. Pourquoi cette voie entrepreneuriale séduit tant les français ?

 

DES INDIVIDUALITES OUVRENT LA VOIE…

Le succès de la franchise, tient de l’arrimage d’un bon concept et d’une bonne exécution. Alchimie probante en France, pays des idées et de l’individualisme. A commencer par le bon concept : Quel est le point commun entre Yves ROCHER, Jacques DESSANGE, Franck PROVOST et Alain AFFLELOU ?…. Ce sont des affaires d’hommes(1).  Chacun a mis son nom sur la table. Surtout, ils ont (é)prouvé leur concept. Eux-mêmes pilotes avant de piloter les autres, à l’instar d’un Yves ROCHER fabricant ses onguents dans le grenier de sa maison natale, premier centre d’expédition de ses ventes par correspondance dès 1959.

…A DES INDIVIDUS IMPLIQUES

A continuer par la bonne exécution. Oui, le mariage entre franchiseur et franchisé fait des petits pour longtemps si les deux parties (s’)investissent. Parce que non seulement le franchisé apporte du capital (entre 10 000 et 1,5 millions d’euros selon les enseignes) mais surtout parce qu’il s’engage dans un choix de vie, son obligation de résultat est plus forte que celle d’un salarié. De fait, le taux de rentabilité sur RBE des franchisés Brioche Dorée s’avère supérieur de 28% à celui des magasins succursalistes(2).

En 2013, 30 % des Français expriment leur envie de créer ou de reprendre une entreprise (3).   L’intrapreneuriat en mode franchise fait recette. Si environ la moitié des entrepreneurs échouent dans les cinq premières années, les chances de réussite en franchise sont dix fois supérieures selon Louis Le Duff(2).

 

ESPRIT JACOBIN

Les deux premiers facteurs clés de succès de toute franchise, notoriété et homogénéité, renvoient à l’esprit jacobin encore prégnant et à la cohérence interne du territoire France.

Afin de gagner la course à la notoriété, Guillaume RICHARD, fondateur du réseau O2 investit 10% de son chiffre d’affaires en communication(4).

L’homogénéité, elle, relève de trois critères, caractéristiques de notre terreau mental français :

  • Fraternité, esprit de famille : « je dois une partie de mon succès aux  « mercis et bravos » soutenus par un budget fleurs et chocolats en interne » déclare Guillaume RICHARD.
  • Normativité et sens critique : les enseignes pérennes ont su rédiger des livres de normes…les mettre en œuvre et les améliorer(5).
  • Sélectivité, tant la force d’une chaîne se mesure à l’aune de son maillon le plus faible.

AGILITES LOCALES

Mais le franchisé ne serait pas « gaulois » s’il ne recélait sa part d’irréductibilité. Laquelle complète le trousseau de deux facteurs clés :

  • Initiative et adaptabilité terrain.
  • L’innovation, cocktail de la diversité des parcours des franchisés et de la qualité renouvelée des échanges entre eux et avec le franchiseur dont l’expérience s’enrichit par là. Une telle innovation fertilise l’ensemble du réseau !

 

  • Rare exception confirmant la domination masculine des créateurs de franchises, Geneviève LETHU. Les femmes constituent en revanche 40% de la population des franchisés en France.
  • Louis Le Duff « réussir en toute franchise » chez Albin Michel (2006).
  • Source : Sondage réalisé en 2013 par l’institut Think pour l’Agence pour la création d’entreprise (APCE).
  • Soit 9 millions d’euros. O2, leader des services à la personne, est le premier recruteur de France 2008-2013 selon une étude Xerfi.

En outre, avant de devenir franchisé, la loi Doubin oblige le franchiseur à remettre à tout postulant un Document d’Information Précontractuel. http://www.franchise-fff.com/

NOS LOGOS pour la vie…et par delà !

Construire sa marque  relève désormais d’une démarche profonde. Laquelle épouse, voire soulève, le projet entrepreneurial. S’y atteler, c’est émettre des signaux forts de confiance en son entreprise.  A raison ?  Il semblerait que le branding renforce solidité financière et longévité…

Petite histoire du branding

Dans l’Amérique des cow-boys, le brandon désigne le fer marquant le bétail. En Europe, les cartouches pyrogravés attestent de l’origine des caisses de vins déjà un siècle avant que les crus bordelais ne se classent, en 1855(1). Jusqu’au milieu du XXè siècle, les architectes gravaient souvent de leur nom la pierre angulaire des immeubles construits selon leurs plans, engageant par là leur responsabilité. D’innombrables fabricants et industriels ont ainsi parié sur la postérité. Pensez aux constructeurs automobiles portant encore les noms de leurs créateurs par exemple. Puis, avec Bleustein Blanchet et les Mad men, l’audace et la confiance, si l’on en juge d’après l’orientation des investissements depuis sept décennies, basculent du camp des inventeurs vers celui des marketeurs. Enfin, à force de publicité, les marques tomberont, au XXIè siècle, dans le domaine public. De fait, sinon de droit. Pour vous en convaincre, songez au tollé soulevé par la velléité de GAP de modifier son logo et au statu quo dicté par sa communauté de consommateurs. En moins de trois siècles, s’est imposée la science à construire des marques : le branding. Ironie de l’histoire, celui-ci a d’abord été circonscrit au signe de la propriété pour finalement devenir l’affaire de tous. De la lecture de ce paragraphe, retenez que les marques sont désormais de plus en plus le fait de leurs publics(2) après avoir été l’apanage de fermiers, de fabricants et de publicitaires.

 

Or les publics s’emparent d’esthétique. Au sens, grec du terme, où le Beau et les sensations s’entremêlent(3). Le vocabulaire iconique des marques s’est donc progressivement élargi à tous nos sens. La vue, principal contact sensoriel humain, est abondamment sollicitée : couleurs (le rouge de Louboutin), formes (le flacon N°5 de Chanel), icônes (le Bibendum de Michelin), motifs (le monogramme Louis Vuitton), typo (Renault possède son propre alphabet), illustrations,… sont désormais relayés par l’odorat (le magasin Colette à Paris diffuse « son » odeur et la commercialise), l’ouïe (les sonneries subaquatiques de Skype), le toucher (la Laitière conditionnée en pots de verre granuleux), le goût (Nutella ou Veuve Cliquot savent à quel point leurs recettes sont « marquées ».)

 

Branding contemporain : mode d’emploi

L’entrepreneur « infini » d’aujourd’hui peut procéder en trois points fondamentaux.

  1. Tout entrepreneur gagnera à balayer TOUS ses points de contact avec ses prospects, clients, (futurs) collaborateurs, partenaires etc… et vérifiera leur cohérence interne. De la bande son téléphonique jusqu’au packaging en passant par sa page fan et sa papeterie institutionnelle.
  2. Le NOM est fondamental. Il porte une ambition inaugurale ET indélébile pendant la vie de l’entreprise. Il doit être réfléchi en conséquence. On peut, on doit faire évoluer sa marque et ses attributs mais le nom, lui, reste invariable. Sauf à infléchir le projet d’entreprise…
  • Sans renoncer à son quant à soi, le/la chef d’entreprise sera toujours plus enclin/e à lâcher prise et à substituer aux « cibles » marketing, des interlocuteurs: à la fin des années 90, à Londres, des jeunes femmes arborent le logo DYKEA(4), directement détourné de celui du distributeur de mobilier, lors de la Gay Pride. La direction Marketing d’IKEA intente d’abord un procès à la communauté lesbienne mais se ravise…en réalisant que ladite communauté consomme 20% des produits à forte valeur ajoutée dans ses magasins et influence les autres acheteurs !

 

Les visées du « brand building »

Pourquoi construire une marque ? Comment justifier plus de 30 milliards d’euros annuels en France de dépenses publicitaires ? Outre les logiques de différenciation, ces efforts visent trois objectifs :

augmenter la valeur de l’entreprise.

A partir des années 1980, s’impose la notion de capital de marque (« brand equity ») dont l’évaluation, quoique fluctuante, s’avère toujours plus déterminante pour les sociétés cotées ou lors de transactions financières. Naomi Klein a décomposé la chaîne de valeur d’une paire de chaussures Nike Air(5). Sortie d’usine de Jakarta puis transportée par container, dédouanée au Havre et livrée sur les étagères de ce qui serait maintenant le Citadium Caumartin au coût de 45 euros, elle est commercialisée 110 euros. Les 65 euros restants couvrent d’importantes dépenses  de marketing et de communication et laissent une marge très confortable à Nike. Si la brand equity a pu se traduire par une valorisation financière basée sur des études de marché et sur les investissements de communication passés, les récentes emplettes des FAGA(6) témoignent d’une redéfinition du capital de marque: son calcul s’apparente désormais au capital émotionnel comptabilisant les consommateurs connectés à votre marque…dans le futur.

 

incarner et manifester un projet

Plus l’aventure est individuelle, familiale, plus il y a de l’égo dans le logo. Passé ce stade, l’entreprise réalise à quel point le design porte son dessein, rend sa pensée, son ambition, sa proposition commerciale visibles. A condition d’adopter une posture mentale dynamique ; Les praticiens du branding le savent : le « ing » prime sur le « brand ».

 

prolonger l’espérance de vie

Quel est le point commun entre Solex, Cacolac, Tann’s et Repetto ? Toutes ressuscitées. Comment ? En soufflant sur les braises. En ravivant les souvenirs des consommateurs, en actualisant l’essence de marque pourtant cliniquement mortes, des entrepreneurs audacieux ont accompli des miracles.  Rose Repetto conçoit ses premières ballerines en 1947 et porte sa marque éponyme aux nues jusqu’à son décès en 1984. Reprise par un groupe puis par une banque, la marque périclite…jusqu’à ce que Marcel Gaucher la rachète en 1999, surmonte un dépôt de bilan en 2002 et redonne un formidable essor(7) à l’entreprise en la chevillant au luxe. Autre Phénix, le cartable Tann’s. Conçu par Le Tanneur dans les années 70, il renaît de ses cendres en 2008 après 15 ans d’absence, grâce au souffle de trois trentenaires nostalgiques et téméraires. Là encore, avec 200 000 cartables écoulés en 2013, le « branding cocktail » séduit : le nom, des signes émis cohérents et un souffle originel actualisé.

 

  • il faudra attendre 1935 et l’action du juriste député de Gironde, J. Capus pour faire naître les origines contrôlées.
  • lire l’excellent ouvrage de Catherine Becker « du Ricard dans mon Coca ».
  • le Beau reflète le Bon selon les platoniciens ; les marques savent qu’elles doivent investir bien au-delà des sensations !
  • dyke signifie « lesbienne » en argot britannique
  • No logo, paru en 2000.
  • Facebook, Amazon Google et Apple. Facebook a « acquis » chaque utilisateur de What’sApp pour un coût de 42 US dollars maintenant mais escompte voir ce coût ramené à 19 dollars…lorsque le réseau de messagerie instantanée aura atteint le milliard d’usagers.

CA 2012 : 60 millions d’euros et plus de 50 points de vente en propre dans le monde.

FOUS D’ENTREPRISE

fous_entreprise_Voilà un ouvrage radical. Qui (vous) traite à la racine. Rédigé par un médecin, un sociobiographe, un stratège disruptif, un patron insolite, un fou…d’entreprises. Praticien depuis plus de 30 ans, l’auteur* détaille une approche organique, holistique et renversée de ses clients, des PME françaises et internationales.

S’il nous rappelle que toute entreprise est d’abord une personne (morale), l’auteur adopte une posture globale et une praxis à l’avenant. Ainsi, pour diagnostiquer un client, Roger Couffin et ses équipes n’hésitent pas à convier sociologues ou cartographes…par exemple.

Ex JD, l’auteur insiste sur l’offre originelle de l’entrepreneur. Et renverse un ordre établi. Après avoir revitalisé plus de 700 PME, une constante se dégage : la proposition inaugurale du fondateur est TOUJOURS génératrice de valeur. Pour peu que l’on sache la faire évoluer, la réactiver ou l’exhumer. Après que, trop souvent hélas, ladite offre a été respectivement rattrapée par des causes exogènes, oubliée voire étouffée par le poison universel de tout organisme : la complexité. L’entreprise meurt de la luxuriance de ses branchages et gagne à fertiliser ses racines. Elle a intérêt à trancher dans la surabondance d’indicateurs, conjurer les contorsions, souvent insoutenables à terme, qui consistent à « répondre à un besoin » et même à élaguer la (tentation de) diversification. La complexité étant la règle, la simplicité l’exception, ce livre est, plus que recommandé, exceptionnel.

*Roger Couffin, a fondé et dirige le cabinet de conseils en stratégie ADRIEN Stratégies.

dehors d’oeuvres

chateau_lacosteRencontrer des œuvres d’art à l’extérieur occasionne  une réjouissante dissonance entre artefact et nature comme si lesdites œuvres avaient fui leurs asiles, déjouant la vigilance des gardiens de musées et retrouvaient leur liberté première. Celles et ceux qui auront  par exemple flâné dans le parc des Fondations Maeght à St Paul de Vence, Miro à Barcelone ou pérégriné dans les jardins de Lusiana (musée d’art moderne  de Copenhague), du LAM à Lille voire à Kerguéhennec dans le Morbihan connaissent cette joie infantile de l’art (à) découvert, rythmée par  cette pulsion qui sous tend la chasse aux œufs ou le jeu de piste.

Lorsque la culture s’enracine  dans l’art de cultiver la Terre, elle manifeste la possibilité d’élever l’Humanité comme l’agriculture nous a transformés en communautés édificatrices, il y a 25 000 ans de cela.

Tandis que l’agriculture vise l’accumulation, l’art, placé sous le signe de la dépense nécessaire, dionysiaque par essence,  a parti lié avec le vin.  Dans le Rioja, Frank Ghéry a dessiné un chai (d’œuvre). Cet été encore, des viticulteurs bordelais ont convié des artistes à enivrer leurs vignes…

Mais le comble, heureuse collusion entre art contemporain et terre dédiée à la création (une nouvelle définition du vignoble ?)  le comble de la démesure pourtant toute tendue vers la sophistication, est atteint au château La Coste à  proximité de la Roque d’Anthéron.

Le bâtiment central couvre un parking dont la sortie piétonne à elle seule crée l’événement : votre corps émerge d’une eau miroitant, outre un ciel azuréen,  l’antonyme de Narcisse, une araignée dont la maman s’appelle Louise Bourgeois ! Ce bâtiment abrite aussi l’accueil et le restaurant, pensé par  Tadao Ando pour aiguill(onn)er votre visite.  Et vous voici parti pour une heure trente de dilection à travers les vignes et les pinèdes. On y rencontre Richard Serra, mal à propos, lacérant la terre de ses lames de fer avec moins de grâce et de malignité que ne l’eut fait même une charrue géante, Andy Goldsworthy qui vous « nidifie » dans une cavité tapissé de chêne lequel vous tonifie et vous abreuve de sérénité à la fois. Plus tard, Guggi vous installe un immense calice, enivrant réceptacle de futures libations, après que vous avez médité aux sons inextinguibles des cloches de Paul Matisse et manqué la révélation que  Tadao Ando, encore lui, s’efforce de vous aménager,  une révélation relevant du « fiat lux » de la genèse qui ce jour là ne vient pas tant le ciel, gorgé d’eau, reste avare de lumière.

Une promenade inégale, dont les mauvais esprits pointeront l’ambition marketing visant à surpondérer le prix de vente des millésimes ou l’opportunité d’offrir un terrain de jeu défiscalisé pour ultra riche… La frivolité est profondément civilisatrice. Ce jour là, on s’est bien amusé.

Le « Brand content » d’accord, le public content d’abord

Gisement économique encore sous-exploité en France, le tourisme culturel explosera…fort d’une communication et d’une médiation adaptées.
Des temps forts et pas (ou peu) de temps morts. Un contenu substantiel. Un siège social-patrimonial magnétique, des rendez-vous physiques : les 30 000 lieux de culture et musées en Europe, ont chacun des atouts que de nombreuses marques devraient leur envier.

Concernant la France, il ne s’agit pas d’en faire un musée. Elle l’est. Il s’agit de mettre en musique (l’étymologie du mot Musée nous y invite) son patrimoine et son activité artistique. Le public est prêt, le contenu est là. En réaménageant son dispositif d’accueil, le musée du Louvre a quasi triplé sa fréquentation. A Lens, 10 000 personnes traversent chaque jour la galerie du Temps depuis son inauguration le 12/12/12. Le Centre Pompidou à Metz attire 500 000 personnes par an soit + de 50% au-delà de ses espérances lors de son lancement en mai 2010 tandis que la version mobile de la marque aura drainé plus de 200 000 visiteurs depuis le début de sa tournée hexagonale en mai 2011. Presque 2 français sur 3 fréquentent les lieux de culture.

La France, outre ses blockbusters « brick and mortar », a su créer d’immenses rendez-vous culturels à l’instar des Festivals d’Avignon ou de Cannes et plus récemment des Vieilles Charrues ou des Transmusicales. Dénominateur commun de ces succès ? Ils sont l’apanage de passionné(e)s. De celles et ceux ayant « quelque chose à dire » obstiné(e)s de l’intrinsèque qualité de l’offre, obsédé(e)s du respect dévolu au public  avant de se préoccuper de « l’histoire à (leur) raconter ». Comment expliquer, par exemple, la revitalisation du 104 depuis 2010 autrement qu’en flattant l’exceptionnel entrain de son nouveau directeur artistique ? Si le propos est substantiel, l’expérience sur site réussie, le succès n’est plus qu’une affaire de com’. Nous y voilà.

Entendons-nous bien, la communication culturelle ne jette ni paillettes ni argent par les fenêtres. Elle vise à renforcer les modèles économiques des entités qu’elle promeut, à créer des richesses, fertilise l’attractivité des territoires. Le développement culturel est encore économiquement sous-exploité en France. Un exemple ? Première destination au monde avec 84 millions de touristes annuels, si les acteurs français parviennent à vendre une visite/un spectacle de plus par touriste et par an, une entrée de devises d’un milliard d’euros se profile.

Si « le beau fait vendre » selon la formule du designer Raymond Loewy, comment vendre le beau ?

  • en décloisonnant les compétences: la com’ n’est jamais aussi efficace que lorsque les programmateurs/commissaires d’expo s’impliquent en amont et partagent leurs projets avec les responsables du marketing et les chargés d’accueil dans les lieux de culture.
  • en repensant le contenu aux fins de le rendre engageant et appropriable.
  • en cultivant son identité dans la durée.
  • en incorporant la révolution numérique au sein de chaque musée (au moins 35% des visites sont préparées sinon prépayées sur internet).

Ces postures et mesures  ne dessinent pas la pierre de rosette qui réveillera la France. Elles visent à booster la communication culturelle. Elles sont autant de clés pour « entreprendre la culture ». Plus qu’une marque, le musée français, se considère comme un symbole dont l’étymologie nous rappelle la fonction de conciliation. Les lieux de culture et leurs communicants gagneront à dépasser le « brand content » pour viser un public content. Les enjeux sont économiques et à terme sociétaux !

Art monde

Anish_Kapoor7  Certains artistes contemporains non contents de tisser une réputation mondiale cultivent le don d’ubiquité. Les meilleurs de ces artistes nous fascinent. Au sens étymologique du terme car l’admiration qu’on leur voue se teinte d’effroi.

A l’instar de son « Red Homeland » en rotation, immense cadran de cire rouge perpétuellement labouré, Anish Kapoor incarne tout à la fois l’apatride, le Démiurge et le Martyr livré sans relâche à ses obsessions.

Après Alice au pays où les aiguilles ont déserté les montres, Anish Kapoor habite une planète sans méridiens ni latitudes. Pour cause : il en a mappé quelques unes de ses œuvres !

L’univers de l’artiste fait une incursion dans chaque réceptacle urbain prêt à l’accueillir. Sitôt installé, son monde se retourne comme un gant et le spectateur y pénètre. Parce que l’on ne voit pas une œuvre d’Anish Kapoor, on « entre dans son monde ». Double pénétration hermaphrodite en vérité. Expérience obstétrique ou réminiscence pré-natale selon Anish_Kapoor5que l’on se trouve dehors ou dedans. Cette réversibilité expérientielle violente, du monde d’Anish Kapoor, confère à son visiteur (on ne « contemple » pas l’œuvre de Kapoor, on la visite) un super pouvoir : celui de l’ubiquité. Pas celle, molle, du réseau social (où l’on voit) celle, bouleversante, de l’art à l’œuvre (où l’on vit)*. Certains artistes mondialisés cultivent un don : le don de NOTRE ubiquité. Comment s’étonner  dés lors de ce que le Grand Palais, lors de son dernier Monumenta, ait compté 200 000 visiteurs !

*Incidemment, le Leviathan était déconseillé aux femmes enceintes.

*A Milan, à la Fabrica del Vapore, chaque visiteur signe une décharge avant de s’engager dans le tunnel de 57 m conçu par l’artiste. (jusqu’à fin janvier 2012).

Anish_KapoorBastoun

Sacré monstre.

Marie-Claude PIETRAGALLA au Palace mars 2011 :

Déesse déchue, Diva musclée.

Pietragalla, dans son dernier spectacle,  nous raconte les limites de l’émancipation féminine en retraçant l’Histoire, le 8 mars, d’Eve et de toute sa descendance jusqu’à l’executive woman dont la vie syncopée confine à l’absurde. La tentative d’une narration itérative (on a le droit à un flashback accéléré du one woman show en vidéo à la fin) échoue sur les rives de la démagogie et d’une danse qui ne se suffirait plus à elle-même, étayée par le bruit et les technologies.